Le plaisir simple de la
« première gorgée de bière »
De ma chaise, au delà du ressac / passe
à l’horizon de cette mer sans marée / sonne
le ronflement d’un lourd Ferry bleu et blanc / trahi
par l’écume claire de son étrave droite / disparaît
aux confins d’une île plantée d’olivier et de parasols
D
J’adore les ferries.
Ce mélange d’air marin, d’huile lourde et de tôle mazoutée embaume et promet les saveurs de plats dont on ignore encore le menu.
Ces croisières même modestes, changent le voyage en expédition, l’itinéraire en aventure.
Le macadam devient liquide.
D
C'est curieux,
nous sommes en 2024 et ce voyage me donne la furieuse impression d'un retour aux années noires de Europe sous la domination allemande.
Les cris et les chiens de garde en moins. En fermant les yeux, assis a la table numero six du restaurant, modeste mais pratique, du camping Sofias a 25 kilometres de Igoumenitsa en Gréce, j'ai un aprés-goût de ce qu’aurait été mon pays et tant d'autres si Adolf avait tenu ses promesses d'un Reich de plus de mille ans.
De simples bourgeois, travailleurs, disciplinés sans les oripeaux Nazis auraient alors fait leur paix avec les peuples vaincus et imposé, sans que cela ne dérange le commerce et les commensaux, la langue qu’ils aboient ou susurrent selon les circonstances.
Assis devant mes Suvlakis, J'ai impression de vivre une uchronie avec une Europe teutone paisible se reposant sur ses conquêtes avec la bénediction des conquis 60 ans apres les guerres et la fermeture des camps par manque de victimes a y réduire en cendres : nous sommes en 2024 et c'est la paix. Trois generations apres le « suicide » de De Gaulle, on a oublié pourquoi les américains ont débarqué et réembarqué apres qu'ils aient trouvé que, tous comptes faits, il y avait moyen de s’entendre avec ces têtes blondes et leur vendre du Coca et les illusions qui vont avec.
Bien sur, ces entendements ont nécessités quelques arrangements avec la liberté de parole et l'étroite surveillance qu'un « Gross brueder » nous impose en nous glissant un rectangle téléphonique dans la poche a soulevé ca et la quelques réticences. Mais globalement quand je regarde autour de moi, assis à la table 6 du restaurant, je vois des conquérants aux cheveux blancs, a peine arrogants qui au volant de leurs gigantesques mobilhomes ont décidément gagné toutes les guerres. Sorti de cette uchronie, Je serai donc seul a ne pas parler allemand ce soir.
Le personel grec semblant vivre en parfaite harmonie avec cette réécriture de l'histoire. Seuls les plats seront indigènes car il pousse peu de choux sous cette latitude. D.